En 2011 nous avons été invités à porter deux thèmes très importants : la commémoration du 150e anniversaire de naissance de Rudolf Steiner et l’individualité de Christian Rosecroix. Quand on aborde la biographie et les conférences de Rudolf Steiner, on constate que Rudolf Steiner avait un lien privilégié avec l’individualité de Christian Rosecroix. À plusieurs occasions, Steiner mentionne de façon spécifique l’apport important de ce grand guide de l’humanité, à tel point que l’anthroposophie peut être nommée comme une forme moderne du rosicrucisme. (1)
L’année dernière, différents événements dans le monde ont eu lieu, en particulier en Europe, pour souligner l’héritage et la pertinence de l’oeuvre de Rudolf Steiner pour notre époque. Au Canada, d’un bout à l’autre du pays, plusieurs groupes de membres ont aussi tenu à marquer cet anniversaire soit par des événements publics telles des conférences, des activités pédagogiques, la fabrication et l’épandage d’une préparation biodynamique à la Saint-Jean ou des rencontres en cercles plus restreints. Ces célébrations étaient une façon de témoigner la reconnaissance envers Rudolf Steiner et son oeuvre.
Il y a quelques mois, je devais prendre des devises étrangères à ma banque montréalaise afin de les remettre à ma fille qui partait en Amérique Centrale. En arrivant à la succursale, un préposé me fit savoir que la banque était fermée en raison d’une panne électrique dans le quartier. J’insistais pour entrer en expliquant que j’habitais à 100 km de là et que je ne pouvais pas revenir aussitôt et que de plus, ma fille partait le lendemain.
L’employé de la banque me fit finalement entrer. Étant le seul client, j’ai eu droit à un service royal : cinq employés et la gérante pour répondre à ma demande. Mais il y avait un problème : les ordinateurs ne fonctionnaient pas! Que faire dans un tel cas? Les employés semblaient pris au dépourvu. Comment enregistrer la transaction? Comment calculer le montant en dollars canadiens? Comment enfin, me donner un reçu? On semblait être revenu 30 ans en arrière à l’époque où on ne disposait pas d’ordinateurs.
Finalement, les six personnes ont pris près d’une demi-heure à régler ma demande. Les employés n’étaient visiblement pas préparés à faire face à une telle situation. Et même la gérante avait de la difficulté à calculer la conversion des dollars canadiens en pesos.
Quelques semaines auparavant (le 23 octobre), parut un article fort intéressant sur les écoles Waldorf dans le New York Times. Dans cet article, on mentionne comment les employés qui travaillent pour des compagnies de la Silicone Valley, en Californie, envoient leurs enfants à l’école Waldorf afin qu’ils apprennent à ‘manier le crayon’. On y vente les mérites d’une pédagogie pratique pour la vie.
Quand Rudolf Steiner parle de l’enseignement de Christian Rosecroix, il précise l’importance d’un mouvement spirituel où la pratique dans le quotidien est de première importance. Un homme se casse une jambe, est-ce qu’on a de la pitié pour sa souffrance? Oui! Mais il est aussi important de savoir quoi faire et de se mettre en action. L’attitude n’est pas celle d’un spectateur mais davantage celle d’un être agissant en toute connaissance. Les outils électroniques ont pris une place prépondérante dans notre vie quotidienne; une éducation en lien avec la vie pratique, concrète est sûrement une façon de remédier aux défis d’une surspécialisation cybernétique et de garder l’indépendance de nos facultés humaines.
En 1911, Rudolf Steiner a donné plus de détails sur l’individualité de Christian Rosecroix et de sa mission. Aussi, il a crée, en décembre de la même année, une nouvelle initiative, une dotation (Stiftung) : avec un nom provisoire de Dotation pour un style et un art théosophique. Cette initiative venait directement de l’impulsion de Christian Rosecroix et Rudolf Steiner devait choisir (interpréter) un groupe de personnes pour faire un travail de recherche spirituelle.
Chacun des membres de cette société était un représentant d’un art en particulier, chacun avait une entière liberté de recherche spirituelle basée sur la confiance et le groupe devait par la suite dans une complète autonomie, continuer le travail sans l’intervention de Rudolf Steiner. Il va de soi que les personnes choisies devaient s’engager dans le travail avec une attitude dépourvue de tout intérêt personnel.
Malheureusement, la dotation n’a pas abouti (2). Il reste que la façon de travailler présentée lors du début de la dotation, demeure une inspiration pour notre époque. Déjà, en ce temps, Rudolf Steiner avait jugé nécessaire la naissance d’une initiative spirituelle pour faire face à un matérialisme destructeur croissant, aussi, à ce moment là, le deuxième drame mystère avait vu le jour. L’approche artistique inspirée d’un travail spirituel authentique n’a pas perdu de sa pertinence aujourd’hui.
Au début de novembre dernier, j’ai participé, au Goetheanum, à la rencontre des secrétaires généraux, des responsables des sections et des membres du comité directeur. Cette rencontre avait pour thème : Voir les divergences et construire ensemble. Nos conversations ont porté sur comment rallier les différents courants dans la Société Anthroposophique pour parvenir à un travail commun. Nous savons qu’à l’intérieur de la Société les divergences peuvent se situer entre deux points de vue bien distincts; Il y a ceux pour qui la connaissance est mis à l’avant plan et d’autres pour qui l’action est de première importance. À la lumière de la dotation, la question de la confiance et de l’autonomie s’avère importante dans la recherche spirituelle. Comment être suffisamment créateur et faire notre bout de chemin spirituel dans un but commun et ce malgré nos divergences? Cette question est aussi pertinente pour nous.
Nous avons également partagé une image de ce qui se passe dans le monde d’aujourd’hui, en particulier les événements marquants de 2011. Le Comité Directeur a présenté sa nouvelle façon de travailler en incluant les secrétaires généraux des Pays-Bas, de l’Allemagne et de la Suisse dans la prise de certaines décisions.
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Le 21 janvier, à Toronto, les membres du Conseil de la Société Anthroposophique du Canada et les lecteurs de classe se sont rencontrés pour partager leurs réflexions suite à une recherche sur le thème L’Anthroposophie : une forme moderne du rosicrucisme et l’âme du peuple canadien.
En soirée, après une courte présentation sur le thème, il y a eu un échange avec les membres locaux. Lors de cet échange sur la question de l’âme du peuple canadien, cette atmosphère rosicrucienne était en arrière-plan et nous a aidés à remarquer que la situation canadienne était en évolution. Les valeurs d’ouverture, de tolérance et de création artistique ont été mentionnées comme des caractéristiques de la nation canadienne de même que la diversité des personnes qui ont peuplé le Canada; l’apport des nouveaux immigrants témoigne d’une grande richesse culturelle. L’âme du peuple est donc encore en train de se forger pour le futur. Serons-nous alors étonnés, à ce compte, de retrouver sur le billet de 20 dollars canadiens la pensée de l’écrivaine Gabrielle :
Nous connaîtrions-nous seulement sans les arts ?
Arie van Ameringen
Secrétaire général,
Dunham, Québec
(1) Peter Selg a écrit récemment un livre en allemand sur Rudolf Steiner et Christian Rosecroix. Voir aussi le texte de Sergei Prokofief sur le thème de l’année.
(2) Virginia Sease explique dans son petit livre Rudolf Steiners Versuch einer Stiftung für Theosophische Art und Kunst 15.Dezember 1911 ( pas encore traduit ) l’historique de cette société et les personnes qui y participaient.
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