Chers amis,
En janvier, nous avons entamé notre rencontre des membres du Conseil avec les responsables de Classe en abordant le thème et l’ambiance de l’intervalle. L'espace entre deux notes de musique, entre les vers d'un poème, entre les courbes d'une sculpture, ou encore les espaces qui font d'une œuvre d'architecture un lieu humain – c'est là où la vie et l'art naissent, où la substance terrestre se retient pour qu'une substance spirituelle puisse entrer. Et l'espace n'est jamais seulement de l'espace, mais toujours simultanément du temps qui se retient ou bien de l'espace en voie de devenir mouvement. Comme porteur de ces qualités d'espace-temps, l'intervalle permet la naissance d'une réelle vie entre deux êtres humains.
Au cours de notre rencontre, la réalité de l'intervalle est devenue non seulement le contenu mais aussi l’activité : écouter entre les paroles de notre interlocuteur; accorder à l'autre de l'espace pour parler; intégrer des espaces dans notre propre discours. En faisant notre retour sur la fin de semaine, nous nous sommes interrogés certes sur le contenu mais aussi sur comment nous avions réussi ou échoué dans notre effort pour créer les espaces nécessaires à une véritable conversation.
La peur supprime les intervalles. Elle rétrécit l'espace et démolit le temps. Sous le coup de la peur les paroles se soudent ensemble; nous sommes ainsi privés des intervalles nécessaires pour pouvoir faire les bons choix à partir de notre être intime et nous devenons insensibles à ceux qui sont touchés par nos choix. La peur provoque la panique – notre volonté est ainsi accélérée ou bien son élan est gêné. La peur ne laisse aucune place à une « volonté illuminée par la conscience » (une interprétation possible du dernier vers de la méditation de la Pierre de Fondation).
Lorsque, au mois de novembre dernier, les Secrétaires généraux se sont réunis au Goetheanum, une ferme intention de surmonter la peur vivait sous la surface de toutes nos conversations – surmonter la peur en pénétrant le plus loin possible dans les problèmes auxquels notre Société (et en effet le monde entier) fait face. Ici encore, les intervalles se sont fait sentir. Quand nous nous sommes penchés, par exemple, sur les tâches premières de la Société anthroposophique : le dévoilement d'une christologie pour l'humanité à partir d'une compréhension du Christ éthérique; l'importance de la connaissance du karma et de la réincarnation pour l'individu et pour l'humanité; la rencontre avec « l'être de l'Anthroposophie » à l'intérieur de la Société; une véritable pénétration dans l'école de Michaël et dans le culte suprasensible – je n'ai pas pu m'empêcher de penser que Rudolf Steiner avait laissé caché « entre les lignes » quelque chose concernant la tâche de la Société, quelque chose qu'il incombe à nous découvrir par notre travail ensemble.
Durant les quelques jours précédant la fin de semaine avec les responsables de Classe, je me suis rendu dans la région de l’Estrie au Québec. Et suivant la rencontre en question, je suis allé à Kingston, et de là à Toronto pour participer à un atelier sur Parzival animée par Regine Kurek et ses collègues de « Arscura » (initiative de formation en art thérapie qu'elle a fondée il y a bien des années). Les conversations qui sont nées pendant ces séjours ont porté sur toute une gamme de questions, allant de la recherche de nouvelles et véritables formes pour le travail de la Société (en Estrie) à l'effort pour nous comprendre en tant qu'êtres humains à notre époque (à Kingston). Ceux d'entre nous qui nous sommes réunis pour pénétrer dans le récit de Parzival avons cherché à découvrir en ce récit un chemin pour l'époque de Michaël. J’ai pu assister à deux belles présentations inspirées par la méditation de la Pierre de Fondation, l'une a Montréal, l'autre à Toronto : à Montréal, par un groupe de membres et amis sous la direction de Hélène Besnard; et à la Toronto Waldorf School par la troupe « Northern Star Eurythmy » qui prépare une présentation pour le congrès « Encircling Light » du mois d'août prochain.
Au cours de mes déplacements, bien des membres et amis m'ont accueilli dans leurs foyers, dont Colin Rioux-Beauséjour et Karen Liedl, Jacques Racine, François Dostie, Paul Décarie, Diane-Huguette Beauséjour, Kris Colwell, Tammy Caldwell, Nancy MacMillan, Willem et Marie-Claire Roset-Joubert, Michel Bourassa, Denis Schneider, et Regine Kurek et Jef Saunders. Tout au long de ces journées, une conscience des intervalles a maintenu nos conversations vivantes.
À la mi-février je suis allé à Whitehorse. Il neigeait quand l'avion a atterri, mais ensuite les nuages ont cédé la place à des journées d'un ciel bleu éclatant suivies systématiquement de nuits de 30 degrés sous zéro. Le premier soir, je me suis retrouvé avec Joe Bishop, chansonnier qui habite le Yukon depuis vingt ans, qui a travaillé comme « wilderness guide » (guide d'excursions en pleine nature) et qui, avec d'autres musiciens locaux, s'exécutera lors de la soirée de clôture du congrès. Suivant notre souper ensemble, nous nous sommes trouvés assis dans la « Alpine Bakery », grâce aux bons soins de Suta Tuzlak. Pendant que Peter, le boulanger, s'occupait des préparatifs pour sa journée du lendemain, Joe a sorti sa guitare et, pendant une heure de temps, a partagé ses chansons avec Peter et moi. Je vous laisse les paroles d'une de ses chansons en guise de conclusion :
Prenez un livre quelconque
Ouvrez-le à la page dix-sept
Ne lisez pas ce qui y est imprimé
Lisez ce qui se trouve entre….
Entre les lignes
Entre les mots
Tout le monde a une histoire
Qui ne demande qu'à être racontée.
Mes meilleures salutations, en cette époque où la lumière revient vers nous,
Philip Thatcher
Secrétaire général
Wednesday, March 4, 2009
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