- de Richard Chomko
Au mois d’août dernier,
nous étions quelque 300 personnes venues de partout dans le monde à nous réunir
à Spring Valley, dans l’état de New York, pour assister aux Drames-Mystères de
Rudolf Steiner présentés en langue anglaise.
Le contingent canadien
était composé de personnes de la Colombie-Britannique, de la Nouvelle-Écosse,
du Québec, de l’Alberta et de l’Ontario. Nous étions même dix résidents de la
maison Hesperus. On y retrouvait également des spectateurs venus d’Angleterre,
d’Irlande, de la Nouvelle-Zélande et une douzaine d’individus qui avaient fait
le voyage à partir de l’Australie, ce qui m’a fort impressionné.
Bien sûr, on aurait pu
trouver un tas de raisons pour ne pas y aller : la maladie de Lyme qu’on disait
répandue dans la région, des nouvelles assez inquiétantes qualifiant les États-Unis
d’état policier, et puis les coûts élevés du voyage, des repas et de la chambre
d’hôtel – à peu près 2000 $ par personne pour les 10 jours.
Quelques-uns ont pu
économiser en couchant chez des amis, ou à Holder House, improvisant des repas
à partir de provisions achetés à la coopérative d’alimentation ou bien ayant eu
la chance d’avoir reçu leurs billets en cadeau. Pourtant, les coûts
relativement élevés peuvent avoir contribué au fait qu’il y avait si peu de
jeunes parmi les spectateurs. Il paraît cependant que les habitants de
l’endroit avaient eu la possibilité d’assister aux répétitions générales.
Il va sans dire que la
cuisine était excellente, et biologique, et que le congrès avait été très bien
organisé. Et que dire des Drames eux-mêmes? Or, je pense qu’il fallait y
assister en personne pour apprécier l’ambiance qui y régnait. D’un certain
point de vue, c’était comme une réunion des anciens d’une école secondaire. En
effet, on y retrouvait des amis que l’on n’avait pas vus depuis belle lurette,
des amis qui s’étaient assagis avec l’âge! Et, à l’instar d’une rencontre de
l’École de Michaël, presque tous étaient impliqués sérieusement dans l’un ou
l’autre domaine du travail anthroposophique.
Préparer la
sixième époque
Lori Scotchko, une
étudiante en eurythmie originaire de Thornhill, qui suit sa formation à Spring
Valley cette année et qui a participé comme ouvreuse et sonneur de cloches, m’a
raconté que presque tous les habitants de la communauté de Spring Valley
étaient impliqués d’une façon ou d’une autre dans la réalisation de cette
production des Drames-Mystères.
Très tôt au cours du
congrès, on nous a expliqué combien le public d’une représentation théâtrale,
et en particulier d’une représentation des Drames-Mystères, joue un rôle
essentiel pour réaliser la dimension communautaire de l’art de la scène. On
avait la nette impression que ce public était en mesure d’établir une profonde
communion avec les acteurs et les drames eux-mêmes bien que, à la différence de
ce qui se vit à Dornach, les spectateurs ont ri de temps à autre à des
répliques que Rudolf Steiner n’a probablement pas conçues comme étant drôles!
Les rôles principaux de
Johannes et Maria ont été interprétés de manière convaincante par Glen
Williamson et Laurie Portocarrero. Beaucoup d’entre nous connaissaient déjà
Glen pour l’avoir beaucoup apprécié lors de ses multiples représentations, seul
ou accompagné, données ici à Toronto au cours des années. Laurie, qui donne des
cours de formation théâtrale à Spring-Valley, avait à l’occasion fait partie de
ces représentations avec Glen. Un autre acteur professionnel, Matthew Dexter,
était venu d’Angleterre pour incarner le rôle de Capésius.
Un grand nombre
d’eurythmistes et d’artistes de la parole ont aussi participé à la production.
En tant que spectateur, je ne peux pas imaginer comment la représentation
aurait pu réussir si les rôles de Lucifer, d’Ahriman et des trois forces de
l’âme : Philia, Astrid et Luna, n’avaient pas été interprétés sur scène
par des eurythmistes pendant que leurs répliques étaient données par des
artistes de la parole à partir du balcon. Une musique de scène jouée par des
lyres, des cloches, des gongs et un petit ensemble de cordes a servi à
rehausser l’expérience théâtrale.
Il n’est pas facile
d’exprimer en paroles l’expérience d’assister à une représentation des
Drames-Mystères. On a nettement l’impression d’être touché d’une manière qui
dépasse de loin les limites du théâtre traditionnel. Par conséquent, alors que
la prestation de bien des acteurs principaux était brillante et celle de certains
acteurs qui tenaient des rôles secondaires un peu moins, l’effet artistique qui
se dégageait de l’ensemble a été infiniment plus grand que la somme de ses
éléments constituants.
Il va sans dire que dans un
congrès de neuf jours où on jouait quatre drames seulement, et malgré le fait
que chaque drame pouvait durer une bonne partie de la journée, il y avait
énormément d’autres activités. L’art de la parole en grands et petits groupes,
l’eurythmie en petit groupe, les groupes d’échange et les espaces de discussion
libres ont tous fourni un complément heureux aux heures que l’on passait assis
dans l’obscurité d’une salle de théâtre.
Les espaces de discussion
libre accueillaient des thèmes proposés par les participants eux-mêmes. J’ai
été agréablement surpris de voir que quatre personnes se sont rendues à
l’espace de discussion libre que j’avais moi-même proposé sur le thème :
Strader et l’avenir de la technologie occulte.
Comprendre
Rudolf Steiner
Il est évident que les
conférences sur les drames eux-mêmes et sur les personnages ont constitué un
des éléments essentiels du congrès. Lorsque dans les années 90 j’avais assisté
à une représentation de l’Éveil des Âmes
dans la production de Marke Levine qui était à l’époque en tournée à travers
l’Amérique du Nord, une grande partie de la signification de ce qui se passait
sur la scène m’a échappé parce qu’il me manquait la compréhension préparatoire
que ces conférences ont fournie.
Daniel Hafner, prêtre de la
Communauté des Chrétiens pratiquant actuellement à Nuremberg, a donné une série
de conférences d’introduction sur les quatre drames. Je connais Daniel depuis
le temps qu’il travaillait comme prêtre à Toronto, et ai appris à estimer son
style d’érudition anthroposophique. Durant la semaine précédant le congrès,
Daniel avait donné deux conférences et animé un atelier à Toronto, événements auxquels
j’ai tenu absolument à assister.
Une chose que Daniel a très
bien expliquée, c’est que Steiner s’est inspiré de personnes qu’il avait
réellement connues dans la vie ou qu’il avait étudiées en esprit pour créer les
personnages principaux des drames. Capésius, par exemple, représente Karl
Julius Schroer, qui avait été un des professeurs de Rudolf Steiner et était
celui qui avait redécouvert les Jeux de Noël d’Oberufer.
Il y a eu également des
causeries fascinantes et instructives d’autres conférenciers sur quelques-uns
des personnages principaux des drames tels que Capésius, Maria et Strader.
Activités
parascolaires
Nous devons avouer que nous
avons manqué une des conférences de Daniel, celle du vendredi soir, pour rendre
visite à nos fils à New York. Chez Jonathan, à Brooklyn, nous avons connu un de
ses amis, originaire d’Édimbourg. Celui-ci parlait de la génération qui a
atteint la majorité après l’événement du 11 septembre, expliquant qu’on
l’appelle la « Homeland generation ». Il a expliqué également comment
Édimbourg était un endroit du globe où le voile qui sépare les mondes est très mince,
et a raconté comment les conversations familiales chez lui laissaient souvent
sa petite amie interloquée. Car il paraît que ses frères et sœurs sont tous philosophes
ou théoriciens médiatiques et que lors des réunions de famille des mots très
recherchés fusent de partout. Il connaissaît naturellement le mouvement Waldorf
et nos discussions sur les Drames-Mystères ne lui semblaient pas le moindrement
étranges.
Et pour faire
suite à l’événement
La metteuse en scène,
Barbara Renold, a répété plusieurs fois au cours du congrès que d’après elle le
congrès n’aurait pas atteint son objectif s’il ne donnait pas une impulsion en
vue d’un travail continu sur les drames. Je suis sûr qu’elle sera heureuse
d’apprendre que Tim Nadelle a relevé le défi, prenant sur lui l’initiative de
fonder un groupe ici à Toronto pour travailler en vue de monter, d’abord
quelques tableaux, et éventuellement, d’ici deux ou trois ans, tout le premier
Drame sur scène. La première rencontre de ce groupe se tiendra le 20 septembre
de 14 h à 17 h dans les locaux de Hesperus. Barbara offrira de son
côté un atelier en ligne sur les Drames-Mystères à partir de l’automne, et
visitera plusieurs centres pour susciter de l’intérêt pour ce travail.
Glen Williamson et Laurie
Portocarrero entreprendront à partir de l’automne une tournée pour présenter
leur spectacle en duo portant le titre : The Mystery Journey of
Johannes and Maria -- Highlights from Rudolf Steiner's Four Mystery
Dramas. Il y aura une représentation du spectacle à la salle Novalis dans
la région de Barrie le 2 novembre à 14 h 30.
Marke Levene, celui qui
nous a présenté L’Éveil des Âmes dans
les années 90, a annoncé son projet de monter une pièce qui fait suite aux 4
Drames-Mystères, que l’on est actuellement en train d’écrire, et d’amener la
production en tournée. Marke prétend former une nouvelle compagnie théâtrale,
dans un lieu qui reste à être déterminé, pour monter et amener en tournée non
seulement cette suite des Drames-Mystères, mais également un spectacle
d’eurythmie avec orchestre ainsi qu’un drame de Shakespeare. On peut trouver de
plus amples renseignements sur ce projet en visitant le : www.workingofthespirit.com.
Comme nous l’avaient
demandé les organisateurs de l’événement, nous sommes restés pour assister à la
cérémonie de fermeture, ce qui a fait que nous n’avons pu lever l’ancre avant 14 h 30
le dimanche après-midi. Nous avions quand même l’espoir d’arriver chez nous
vers minuit. Hélas, une attente d’une heure à la frontière et un retard
supplémentaire d’une heure et demie dû aux multiples chantiers de construction
le long de l’autoroute ont repoussé notre arrivée jusqu’à 3 heures du matin.
Comme dirait l’autre, au Canada nous avons deux saisons : l’hiver et la
construction.
Le lendemain, comme je ne
me sentais pas très bien, je suis descendu voir le docteur McAlister pour voir
si je n’avais pas attrapé la maladie de Lyme. Lorsque je lui ai dit où j’avais
été, Kenneth m’a raconté que lui-même avait tenu les rôles du juif et de
Strader dans une des premières productions des Drames-Mystères sous la
direction de Hans Pusch à Spring Valley dans les années 70.
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